Situé dans le VIIIe arrondissement de Paris en Ile de France, dans l’hôtel de Camondo, le musée Nissim de Camondo, inauguré en décembre 1936, fut construit par René Sergent entre 1911 et 1914 en bordure du parc Monceau. Il abrite une collection exceptionnelle de mobilier et d’objets d’art du XVIIIe siècle français dans une riche demeure grand-bourgeoise, préservée dans l’état où elle était habitée.
Historique et exposition
A la demande du comte Moïse de Camondo, l’hôtel particulier fut construit en 1912 par l’architecte René Sergent, en lieu et place de l’ancien hôtel qui avait appartenu à ses parents, démoli en 1911 à l’exception du bâtiment sur la rue. La nouvelle bâtisse s’inspire du Petit Trianon de Versailles. Moïse de Camondo y installa ses collections, qu’il ne cessa d’augmenter jusqu’au 14 novembre 1935, date de sa mort. Comme dans beaucoup d’autres demeures prestigieuses de cette époque, le jardin est dessiné par le célèbre architecte-paysagiste Achille Duchêne. Mais au début du XIXe siècle, les Camondo, une famille juive sépharade, avaient fondé une banque qui était devenue l’une des plus importantes de l’Empire ottoman.
Ils avaient été anoblis en 1867 par Victor-Emmanuel II en remerciement de leur soutien financier à la réunification de l’Italie.
A la fin du Second Empire, les deux frères Camondo, Abraham-Behor et Nissim, quittent Constantinople (aujourd’hui Istanbul) et se fixent à Paris où leur banque est établie depuis 1869. Leurs fils, les cousins Isaac et Moïse, deviennent, sous la 3e République, des collectionneurs avertis et des personnalités bien connues dans le monde de l’art. Dans un Paris devenu le centre européen du négoce d’art à la charnière des deux siècles, il réunit ainsi une collection unique de rares meubles et objets d’art décoratif issus du riche patrimoine de l’ancienne aristocratie de la France mis alors sur le marché, et un ensemble de boiseries anciennes pour leur servir de cadre. La Première Guerre mondiale éclate et, en septembre 1917, son fils Nissim meurt dans un combat aérien, il était un célibataire de 26 ans.
En 1940, les musées nationaux firent transporter tout son contenu, avec d’autres collections publiques et privées qui étaient très importantes, dont celle des Rothschild et des David-Weill – au château de Valençay, alors habité par le duc de Talleyrand, prince de Sagan, dépôt d’œuvres d’art qui fut confié à Gérald Van der Kemp, et qui faillirent disparaître dans l’incendie allumé dans le château par la 2e division Das Reich. En 1944, Béatrice de Camondo, fille du donateur, est déportée vers le camp d’Auschwitz-Birkenau. Vide, le musée Camondo fut fermé jusqu’à la fin de la Guerre.
Le portrait photographique de Nissim de Camondo en tenue militaire accueille toujours le visiteur à la billetterie. Le circuit de visite débute dans l’imposant vestibule, au fond duquel trône un large escalier de pierre de taille et superbe rampe en fer forgé copiée sur celle d’un hôtel toulousain du XVIIIe siècle, dont la cage est ornée d’une grande « chancellerie » tissée aux Gobelins. C’est dans cette pièce d’entrée, à la décoration traditionnellement sobre, que les valets de pied attendaient leurs maîtres lors des réceptions.
Le sourire d’une bacchante d’Élisabeth Vigée-Lebrun nous accueille en commençant par les salons du premier étage dans le grand bureau, aux murs lambrissés de chêne recouverts des tapisseries d’Aubusson représentant Les Fables de La Fontaine. Des meubles exquis, secrétaires à cylindre, tables, commodes ou bonheurs du jour, estampillés de plus grands ébénistes de l’époque, sont disposés dans le grand salon sous le regard de Madame du Molay de Mme Vigée-Lebrun, ainsi que dans le salon des Huet (où sont montrées des Scènes champêtres de Huet) ou encore dans le petit bureau aux tentures de soie cramoisie, dans lequel est exposé un portrait de Necker, ainsi qu’un buste de l’Été, par Houdon. Vous aurez l’occasion de voir aussi de splendides appliques et cartels en bronze de style Rocaille, des tapis et des paravents issus de la Manufacture de la Savonnerie, des porcelaines de Sèvres et de Meissen. À l’étage se trouvent les appartements de la famille, ainsi qu’une lumineuse bibliothèque lambrissée de chêne sculpté, aux rayons garnis de livres reliés de maroquin rouge, dont certains plats aux armes des Talleyrand proviennent du château de Valençay, qui servit de refuge au contenu du musée de 1940 à 1945; la pièce bénéficie d’une vue dégagée sur le parc Monceau.
Le côté confort se voit en descendant au rez-de-chaussée qui nous fait revenir à la Belle Époque, toute à sa célébration du confort domestique avec les ingénieuses dispositions techniques et architecturales nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du service et le confort quotidien : chauffage à air filtré et pulsé, ascenseurs à air comprimé, système de nettoyage par le vide, corniches lumineuses, etc.
De l’autre côté, vous êtes dans la cuisine qui témoigne de l’attention portée par le maître des lieux aux plaisirs de la bouche. Une énorme rôtisserie de fonte accompagne le fourneau central ; au mur reluisent des ustensiles de cuivre qui fleurent bon la cuisine traditionnelle.