Installée dans la vallée de l’Orbieu, la localité est placée dans la zone méridionale du massif de l’Alaric. Son toponyme Lagrasse provient du terme occitan «grassa» (fertile).
Les origines de son abbaye sont antérieures à la fin du VIIIe siècle: sa charte de «fondation », rédigée en 779, nous permet de présumer qu’à cet emplacement s’élevait déjà un monastère. Son premier abbé fondateur, Nimphridius, ami de saint Benoît d’Aniane, est également nommé dans ce document. D’autre part, la légende de Philoména, manuscrit du XIlle siècle, relate la fondation légendaire de l’abbaye par l’empereur Charlemagne et la consécration miraculeuse de l’église abbatiale par le Christ lui-même. Le monastère enrichi par de multiples donations, connaît rapidement la prospérité. Les premiers dons importants sont enregistrés dans un acte de l’an 951. L’abbaye subit un essor prodigieux au cours des IXe et Xe siècles, ses biens s’étendant jusqu’en Espagne. Au début du Xlle siècle, une centaine d’églises et près de dix monastères, allant du Bas Languedoc jusqu’à Saragosse étaient détenus par Lagrasse. La puissance politique de l’abbaye se révèle essentiellement au cours de la croisade contre les Albigeois : Benoît d’Alignan, abbé de Lagrasse de 1224 à 1230, joua souvent le rôle d’intermédiaire entre occupants et occupés. C’est lui qui obtint la soumission de Carcassonne au Roi (1226).
L’abbaye connut son apogée à la fin du Xllle siècle, sous l’impulsion d’Auger de Gogenx, abbé de 1279 à 1309. Ce réformateur rédigea un important statut en 1296. Les périodes troublées du XIVe siècle ralentissent le rayonnement de la région. En 1348, une épidémie de peste noire décima en grande partie sa population. Ces temps de désordres suscitèrent également la création d’une nouvelle réforme du monastère par l’abbé Guy ler Du Breuil, en 1363. Un nouvel essor de l’activité artistique est amorcé vers la fin du XVe siècle, sous l’abbatiat de Pierre d’Abzac de la Douze, avant d’entamer une phase de conflit avec la désignation d’abbés commendataires. L’usage de la commende s’établit définitivement avec l’abbé Philippe de Lévis, en 1502.
Au XVIIe siècle, l’abbaye connut un renouveau spirituel avec l’introduction, en 1662, de la réforme de Saint-Maur, pourtant acceptée difficilement par certains ecclésiastiques.
Lagrasse témoigne d’une ultime ère de prospérité économique au XVIIIe siècle, grâce à son avant-dernier abbé, Armand Bazin de Bezons.
A la Révolution, la communauté, qui ne dénombrait plus que 14 moines, fut dispersée. L’abbaye fut partagée en deux lots et vendue aux enchères comme bien national, en 1796. Cette division demeure encore de nos jours.
D’autre part, sous l’Ancien Régime, l’abbé incarnait le seul seigneur en toute justice de Lagrasse. Cependant, les habitants représentés par des «Consuls», géraient les affaires de la communauté. Ces consuls, cités dés 1269, oscillaient en nombre de deux à quatre.
Du Moyen-Age jusqu’au XVIIIe siècle, les ressources agricoles et l’élevage constituaient l’essentiel des revenus de Lagrasse. Toutefois, le village était également tourné vers l’artisanat et le commerce. La commune, qui se distinguait alors par son activité drapière, accueillait le plus grand marché des Basses-Corbières. Aujourd’hui, ce chef lieu de canton vit essentiellement du produit de la vigne et de l’accueil touristique. II a réouvert ses échoppes qui abritent de nombreux créateurs et artisans d’art.
Villes16/03/2015